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Les comptes de séparation du couple (6)

par | 30/06/2015 | Juridique

Les comptes à l’occasion de la séparation du couple sont l’occasion de donner après coup une qualification juridique aux mouvements financiers intervenus pendant la vie du couple. Le droit offre de multitudes qualifications possibles, au nombre desquelles figure les donations, que nous avons évoquées dans un récent article, et …

La contribution aux charges du ménage

Les faits sont courants : un conjoint réclame à l’autre une créance pour avoir payé une chose pour son compte (par exemple en finançant sa part dans l’achat d’un bien immobilier destiné à devenir le domicile conjugal ou la résidence secondaire du couple); un conjoint occupe le bien de l’autre à titre gratuit (sans lui verser d’indemnité d’occupation); un époux paie des dettes personnelles à l’autre mais en rapport avec la vie du ménage (charges de copropriété, impôts locaux,…). La parade consiste à invoquer la contribution aux charges du ménage qui incombait à celui qui a payé. Le raisonnement consiste à prétendre qu’en payant ces sommes, l’époux n’a fait que contribuer aux charges du ménage, de sorte que rien ne lui est dû. Cette notion concerne autant les époux que les partenaires d’un PACS.

Entre époux, l’obligation de contribuer aux charges du mariage résulte de l’article 214 du code civil. Chaque époux, sauf convention contraire, est censé participer aux charges du mariage à proportion de ses facultés. La notion, subjective, est appréciée en fonction du train de vie du couple. S’il est aisé, la contribution peut s’entendre du remboursement d’un prêt immobilier dont l’objet est le financement de l’acquisition de la résidence secondaire. Le recours à cette notion a lieu essentiellement pour les époux soumis au régime de la séparation de biens dont le contrat de mariage prévoit généralement que chacun des époux sera réputé avoir rempli au jour le jour son obligation de contribution, de sorte qu’aucun compte ne sera fait entre eux au moment de la liquidation du régime. Mais cette présomption revient à vider de son sens la portée de l’article 214 du code civil car à quoi bon prévoir que chaque époux supportera les charges au prorata de ses capacités si tout recours entre eux de ce chef est interdit? Plus encore, cette présomption semble peu cohérente avec l’esprit du régime matrimonial adopté par les époux car avec l’extension du recours à la notion de contribution aux charges du ménage pour faire écher aux comptes entre époux, la Cour de cassation instaure, à l’insu des époux, une sorte de société d’acquêts dans leur contrat de mariage de séparation de biens, dont la philosophie consiste précisément à écarter autant que faire se peut toute notion de communauté…

Entre partenaires de PACS, la question est traitée à l’article 515-4 du code civil relatif à l’aide matérielle réciproque des partenaires qui doit être proportionnelle à leurs facultés respectives. Il est ainsi instauré une solidarité pour les dettes contractées pour les besoins de la vie courante. Concrètement, pour aboutir à ses fins, celui qui conteste devoir payer la dette devra démontrer que son partenaire ne contribuait pas aux charges du ménage, ou plus exactement en deçà de ses capacités. L’article 515-7 prévoit même que les créances entre partenaires peuvent être compensées avec cette obligation à contribution, facilitant ainsi la compensation puisqu’elle est expressément prévue par la Loi. C’est même une facilité à laquelle n’ont pas (encore?) droit les personnes mariées, qui ne peuvent que s’appuyer sur des décisions de jurisprudence en la matière.

Il est évident que le recours de plus en plus fréquent à la notion de contribution aux charges du ménage est une façon détournée d’instaurer de l’équité entre les conjoints au moment de leur séparation et d’harmoniser leurs droits quel que soit leur régime matrimonial et leur mode de conjugalité. Ce rapprochement ne peut toutefois concerner les concubins pour qui la loi n’instaure pas de régime analogue. Il n’en demeure pas moins que le traitement par les juges de la question des comptes au moment de la séparation des couples, si elle est emprunte d’équité, n’est pas dénuée d’incertitude et donc d’insécurité juridique.

L’intérêt de sécuriser « le toit du couple » au moment de sa séparation mériterait une harmonisation des régimes applicables par le biais d’une loi. En attendant, il est préférable de régler la question en aménageant des clauses spécifiques aux termes des conventions fondatrices des rapports patrimoniaux des époux que sont le contrat de mariage ou la convention de PACS. Nous tenterons ainsi, à l’occasion des prochains articles, d’aller à la recherche de la convention idéale.

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